Sheikh Mohammad Ali Ferkous
Question : Je suis une vieille femme qui a commis une transgression pendant ma jeunesse en avortant de mon fœtus après une période (de gestation) dont je ne me souviens pas si elle était de trois ou quatre mois. En effet, cela me tourmente jour et nuit. Pourriez-vous, donc, me trouver une solution ou m’orienter pour me libérer de mon souci et de mon affliction ? Qu’Allâh vous rétribue en bien !
Réponse : Louange à Allâh, Maître des Mondes ; et paix et salut sur celui qu’Allâh عزّ وجلّ a envoyé en miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Cela dit :
En principe, l’avortement est prohibé et interdit car c’est une transgression contre un être existant et fécondé. [Cet acte] est considéré comme crime dès les premières étapes de son existence. Ce crime devient davantage abominable si l’âme est insufflée en lui et sa création est achevée. Aussi, si le crime a été commis, intentionnellement ou par erreur, après qu’il ait atteint les quatre mois, c’est-à-dire cent vingt jours, et que son mouvement est certainement ressenti, cette transgression oblige une expiation comme droit d’Allâh et le prix du sang comme droit de la personne.
L’expiation consiste à affranchir un esclave croyant, et celui qui ne trouve pas d’esclave à affranchir doit jeûner alors deux mois consécutifs. S’il ne peut jeûner, cela restera, selon l’une des opinions des ulémas, une dette dont il doit s’acquitter, ou bien il nourrira soixante pauvres selon l’autre opinion. Cependant, s’il en est incapable, cela restera une dette dont il s’acquittera le jour où il le pourra. Par ailleurs, les menstrues n’interrompent pas la consécution du jeûne d’expiation de la femme.
Quant au prix du sang, il est, obligatoirement, payé par l’argent de la mère, et a la valeur de la moitié du dixième du prix du sang [d’un homme musulman]. Le reçoivent les héritiers du fœtus comme s’il avait été tué après sa naissance, et la mère n’en reçoit rien du fait de son crime envers lui, mais s’ils y renoncent, il n’est pas imposé à la mère selon la parole d’Allâh le Très-Haut :
﴿وَمَن قَتَلَ مُؤۡمِنًا خَطَٔٗا فَتَحۡرِيرُ رَقَبَةٖ مُّؤۡمِنَةٖ وَدِيَةٞ مُّسَلَّمَةٌ إِلَىٰٓ أَهۡلِهِۦٓ إِلَّآ أَن يَصَّدَّقُواْۚ﴾ [النساء: 92].
Sens du verset :
﴾Quiconque tue par erreur un croyant, qu’il affranchisse alors un esclave croyant et remette à sa famille le prix du sang, à moins que celle-ci n’y renonce par charité﴿ [s. An-Nişâ’ (les Femmes) : v. 92]
Si le fœtus, qui a subit l’agression, n’a pas encore atteint les quatre mois, alors pas d’expiation pour celui qui a commis l’avortement, car l’âme ne lui a pas encore été insufflée et l’expiation est obligatoire dans le cas d’un meurtre par erreur s’il a lieu envers une personne qui a une âme. Cependant, si on distingue chez la morula (NDT : première ébauche de l’embryon) une forme humaine ou une partie de ses membres, s’applique alors le jugement concernant le fœtus pour ce qui est de l’obligation du prix du sang.
Du reste, celle qui a commis le crime doit s’en repentir pour Allâh le Très-Haut et multiplier les bonnes œuvres et les actes d’obéissance, car il est authentiquement rapporté que « le regret est un repentir »(1) et que « celui qui se repent d’un péché est semblable à celui qui n’a pas commis de péché »(2).
De plus, Allâh le Très-Haut dit :
﴿قُلۡ يَٰعِبَادِيَ ٱلَّذِينَ أَسۡرَفُواْ عَلَىٰٓ أَنفُسِهِمۡ لَا تَقۡنَطُواْ مِن رَّحۡمَةِ ٱللَّهِۚ إِنَّ ٱللَّهَ يَغۡفِرُ ٱلذُّنُوبَ جَمِيعًاۚ إِنَّهُۥ هُوَ ٱلۡغَفُورُ ٱلرَّحِيمُ ٥٣﴾ [الزمر].
Sens du verset :
﴾Dis : “Ô Mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allâh. Car Allâh pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très-Miséricordieux.” ﴿ [s. Az-Zoumar (les Groupes) : v. 53]
Alger, le 17 de Djoumâdâ Al-Oûlâ 1427 H
correspondant au 13 juin 2006.
Source : Ferkous.com
(1) Rapporté par Ibn Mâdjah (4252), d’après ‘Abd Allâh ibn Mas‘oûd رضي الله عنه. Ce hadith est jugé haşane (bon) par Ibn Hadjar dans Fath Al-Bârî (13/471). Il est, d’autre part, jugé sahîh (authentique) par Ahmad Châkir dans sa recension de Mousnad Ahmad (5/194) et par Al-Albânî dans Sahîh Al-Djâmi‘ (6802).
(2) Rapporté par Ibn Mâdjah (4250) et par Al-Bayhaqî (21070), d’après ‘Abd Allâh ibn Mas‘oûd رضي الله عنه. Ce hadith est jugé haşane (bon) par Al-Albânî dans Sahîh Al-Djâmi‘ (3008).