Le jugement de porter des chaussiers ou des vêtements fabriquées en cuir porcin

Sheikh Mohammad Ali Ferkous

Question : L’usage de chaussures, de valises, de sacoches, de vêtements en cuir fabriqués à partir de peau de porc est-il licite ? Le tannage rend-il cette dernière pure ?

Réponse : La Louange est à Allâh, Seigneur des mondes. Prière et salut sur celui qu’Allâh a envoyé en miséricorde pour l’univers, ainsi que sur sa famille, ses compagnons et ses frères jusqu’au Jour de la Rétribution. Cela dit :
Les gens de science sont d’accord pour dire que le porc est un animal impur en soi(1), et que la saignée ne saurait rendre la consommation de sa chaire licite, car Allâh annonce à son Prophète :

﴿قُل لَّآ أَجِدُ فِي مَآ أُوحِيَ إِلَيَّ مُحَرَّمًا عَلَىٰ طَاعِمٖ يَطۡعَمُهُۥٓ إِلَّآ أَن يَكُونَ مَيۡتَةً أَوۡ دَمٗا مَّسۡفُوحًا أَوۡ لَحۡمَ خِنزِيرٖ فَإِنَّهُۥ رِجۡسٌ﴾ [الأنعام: 145]

Sens du verset :

﴾Dis-leur : Je ne trouve, dans ce qui m’a été révélé, d’autre défense, relativement à la nourriture, que les animaux morts, le sang qui a coulé et la chair de porc, car c’est une abomination. ﴿[s. Al-An‘âm (les Bestiaux) : v. 145] Le tannage purifie-t-il sa peau ? Les ulémas en discutent.

La raison du désaccord réside dans l’interprétation de ce hadith : « Tout cuir tanné devient pur. »(2) :

– est-il d’un usage absolu comprenant tout cuir tanné, que l’animal soit tout à fait pur (consommable ou non), ou impur ?

– ou bien son application se restreint-elle aux animaux purs, vivants, consommables ou non ?

– ou alors, concerne-t-il uniquement la peau des animaux dont la chair est licite, comme les camelins, les bovins et les ovins ?

Selon moi, le hadith se rapporte aux peaux des animaux dont le musulman peut se nourrir en les saignant. En voici la preuve : un jour, le Prophète a demandé de l’eau à une femme. « Je n’en possède point, lui répondit-elle, sauf celle contenue dans une outre faite de peau de bête morte. » « Ne l’as-tu pas tannée ? » L’interrogea le Prophète. « Si », lui rétorqua la femme. « La tanner c’est la saigner », conclut le Prophète avec autorité(3).

L’Envoyé de Allâh a donc comparé le tannage au saignement ; or nous savons que le saignement ne purifie que la chair dont la consommation est licite. D’autre part, le tannage s’apparente à la vie, et comme celle-ci n’élimine pas la souillure, le tannage ne la supprime pas non plus.

Le porc, comme nous l’avons déjà expliqué, est un animal impur en soi selon l’avis unanime des docteurs. Pour cette raison, le tannage ne peut le rendre pur. Il est en effet comme l’excrément : toute l’eau des océans ne saurait le purifier.

Du moment où les chaussures, valises, vêtements en cuir sont en peau de porc, la souillure leur est inhérente. Ils ne peuvent en aucun cas être purifiés. Le croyant est par conséquent tenu d’éviter leur contact, de s’en débarrasser, car Allah dit :

﴿وَثِيَابَكَ فَطَهِّرۡ ٤﴾ [المدَّثِّر]

Sens du verset :
﴾Purifie tes vêtements !﴿ [s. : v. 4]

Et le savoir est auprès d’Allâh et nous disons pour finir : la louange est à Allâh, le souverain des mondes, qu’Allâh honore et salue notre prophète Muhammad, ainsi que sa famille, ses Compagnons et ses frères, jusqu’au jour de la résurrection.

Alger, le 22 de Ramadân 1430 H,
correspondant au 12 septembre 2009 G.

Source : Ferkous.com

(1) Dans son ouvrage Al-Kâfî, à la p. 18, Ibn Abd Al-Barr écrit : « À l’exception du porc, aucun autre animal vivant n’est impur en soi. Certains pensent que même le porc ne l’est pas tant qu’il est vivant. Le premier avis me semble toutefois le plus juste. »

Je dis : Cela concerne le porc vivant. À l’état de cadavre, par contre, les savants déclarent à l’unanimité que le porc constitue une souillure. Ibn Rochd, le Petit-fils, rapporte le consensus (Idjmâ‘) des savants sur cette question : « Concernant les impuretés, écrit-il, les ulémas sont d’accord sur quatre catégories qui sont impures en soi [parmi lesquelles se trouve] : la chair de porc, quelle que soit la manière dont il est mort. » [Ibn Rochd, « Bidâyat Al-Moudjtahid », vol. 1, p. 76]

(2) Rapporté par At-Tirmidhî (1728), An-Naşâ’î (4241), Ibn Mâdjah (3609) et Mouslim (366) avec une autre version.

(3) Rapporté par An-Naşâ’î (4243), d’après Salama ibn Al-Mouhabbiqرضي الله عنه ; jugé sahîh (authentique) par Al-Albânî dans Ghâyat Al-Marâm (26), Cf. : Al-Madjmou‘ d’An-Nawawî (1/218).

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